Intelligence Artificielle : où va-t-on ?

Le mois dernier a vu le grand Eric SADIN passé à nouveau sur Thinkerview. Si vous avez lu quelques articles de ce blog, vous vous doutez bien que cette figure imminente de la réflexion philosophique sur le numérique a un discours qui plait fortement à l’auteure de ces lignes.

Alors de quoi y parle-t-on ?

D’IA, rien que ça. Et c’est quoi l’IA, au fait ? L’IA, acronyme pour Intelligence Artificielle, est un système technologique basée sur la donnée : grâce à toutes les informations présentes sur le web, il est possible de faire des modèles statistiques pour répondre à toute demande. Ca paraît logique, quand on a bien suivi les cours de proba en Terminale S.

Sauf que…

Sauf que quoi ? L’objectif positif de proposer rapidement une solution pertinente à un consommateur en se basant sur la probabilité statistique que ça lui convienne, c’est fort pratique dans la vie courante mais ça fait poser question sur l’avenir de l’humanité. N’ayons pas peur des mots.

Je m’explique, avec mes mots, tout en m’appuyant sur les écrits d’Eric Sadin aussi, mais ce sont mes mots.

L’objectif de toute technologie depuis l’avènement de Google au début des années 2000, c’est de faire du profit. Non de nous rendre la vie heureuse et agréable, désolée pour la déception.

Et comment on fait du profit ? On analyse le comportement numérique, tout en photographiant ou filmant la figure de la personne (c’est un peu plus facile pour connaître ses émotions, mais c’est pas obligé : depuis la fin des années 90, on connaît l’émotion de l’internaute selon sa rapidité de frappe, ses fautes, la richesse de son vocabulaire et la longueur de ses phrases). On stocke cette info, on met des mots clés dessus, on fait des proba et paf on propose de la pub au bon endroit au bon moment, et de façon un peu subtile pour que ça marche. Comment on sait que ça marche ? Quand l’internaute-consommateur a acheté un truc plus cher qu’il ne l’aurait voulu dans une marque qu’il ne voulait pas au début mais qu’il a préféré grâce aux gentilles propositions des entreprises technologiques.

Moi, je dis : si tu as plein d’argent et plein de temps dans ta vie et si ça ne te dérange pas d’en donner à des entreprises américaines pour qu’elle modifie tes choix au quotidien, bah continue, c’est ta vie finalement.

Pour ceux qui galèrent ou qui se retrouvent malheureux en école de commerce alors qu’ils rêvaient de faire archi mais que les pubs les ont poussés dans cette voie, là par contre, c’est un peu plus dérangeant.

Et ça va devenir encore plus dérangeant avec l’IA.

Pourquoi ? Tout simplement parce qu’on ne va plus voir la publicité. Les seuls qui pourraient trouver ça fantastique sont au service marketing de nos entreprises et ils se trompent : ce n’est pas fantastique, même pour eux.

Avec l’IA, nous allons savoir encore plus précisément ce que le consommateur veut à l’instant T et inclure des mots clés spécifiques au bon moment pour l’influencer. Bien sûr, c’est la place du marché : celui qui va payer le plus cher aura droit le premier à ses petits mots dans la réponse de Chat GPT.

C’est ce qu’a fait Google, qui nous a leurrer sur la pseudo-gratuité de ses services, chose peut-être vraie à ses débuts mais ça fait vingt ans que ce n’est plus vrai et qu’utiliser Google, aujourd’hui ça coûte cher.

La belle nouveauté avec l’IA générative (les trucs comme Chat GPT), c’est que maintenant il n’y a qu’une seule réponse ! Jusque là, poser une question à Google amener un choix, étriqué certes et grandement peu varié car choisi par Google selon ce qu’il sait de moi, mais choix quand même ! Avec l’IA, y a plus. Fini. On a la réponse toute crue instantanément.

Et dans cette réponse toute crue, c’est l’heure d’y mettre un peu d’ « INCEPTION ». Vous savez, c’est quand on ajoute une toupie qui ne s’arrête pas de tourner dans l’esprit de quelqu’un. C’est comme ça qu’on peut influencer le comportement.

Si une entreprise bien connue fait le choix de payer Chat GPT pour intégrer les mots « mode à petit prix » dans une réponse, même sans nommer la marque, paf INCEPTION ! Et toutes les études le prouvent, on choisit plus facilement ce avec quoi on est familier. Quoi de plus naturel que de choisir une marque qui est apparu dans ma réponse toute personnalisée rien que pour moi sur une IA.

Quel est le problème de ce système ? Car finalement, c’est un peu déjà ce qui se passe, non ? Le problème, c’est l’usage de nos ressources. Donner encore plus d’argent à ces entreprises technologiques pour faire venir nos clients va encore diminuer la qualité de nos produits.

Avec l’IA, on va consommer plus, de moins bonne qualité.

Est-ce vraiment ce dont on a besoin à l’heure des inquiétudes écologiques et sociales ?

Je ne suis pas sûre que ce projet de société fasse écho à une volonté politique française. Nous n’avons pas voté pour ça.

Pour vous faire votre propre avis : le lien thinkerview de l’interview et différents livres d’Eric Sadin (je vous conseille la Vie algorithmique, un peu ardu, et l’ère de l’individu tyran, du petit lait !)

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